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Burn down the mission
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3 septembre 2005

Kill Bill vol.1

Film américain de Quentin Tarantino
Sortie : 31 décembre 2003   

La somme et le sommet de Tarantino

           Tarantino était tellement sorti de l’actualité que c’est presque avec désintérêt et méfiance qu’on a aperçu une affiche flashy jaune et noire, présentant Uma Thurman habillée en sportswear même couleur et tenant un katana…

           Ce côté flashy, c’est finalement un bon moyen de caractériser le personnage qu’est « the Bride », sinon définie que par une vengeance. Laissée pour morte avec l’enfant qu’elle porte, et après quatre ans de coma, la Mariée se lance à la poursuite des assassins, membres du gang de Bill au sein duquel elle-même exerça autrefois ses talents de tueuse. Elle n’a plus qu’une obsession : tuer Bill.
            
Cette idée, très simple et archi-rebattue, est le point de départ d’une sorte de western kung-fu délirant. Une fois passé l’exposition des malheurs de la mariée, suffisamment horribles pour expliquer sa motivation, on est emballé dans un patchwork cinéphile à grande vitesse. Le rythme est tellement bien balancé qu’on ne peut pas relâcher notre attention, nos yeux sont scotchés à l’écran jusqu’à la fin, qui nous laisse dans l’attente impatiente du volume 2.
C’est peu dire qu’on est loin du réalisme : The Bride affronte le « Détachement international des vipères assassines », Sofie Fatale perd (au moins) un bras mais survit sans garot, etc. Le cinéma de Tarantino repose sur les mythes du cinéma, sur une somme inchiffrable de citations plus ou moins conscientes de styles les plus divers. L’exagération, l'humour et le rythme soutenu empêchent parfaitement qu’on ressente une impression de copier/coller.

            On se souvient des références furtives à Sonny Chiba et John Woo dans True Romance et du remake de City on Fire (Ringo Lam) qu’est Reservoir Dogs, Tarantino a toujours fait part de sa passion pour le cinéma du katana, du kung-fu ou des yakusas. Il livre ici un résumé de ce qu’il y a aimé et appris : le fantôme du polar hongkongais hante le film (Séquence où le combat entre tueuses est arrêté par un enfant, arrivée charismatique du gang dans le restaurant, etc.). Yuen Wo-Ping est à la chorégraphie des combats, et Sonny Chiba rejoue son rôle mythique d’Hattori Hanzo.
Quand à Uma Thurman, elle est l’ange blond exterminateur, descendante des personnages de Sergio Leone, eux-mêmes une transposition des personnages joués par Toshiro Mifune dans les films de Kurosawa (Les Sept Samouraïs, Yojimbo). La boucle est bouclée, notamment avec la scène de combat dans le jardin japonais qui doit beaucoup au duel final d'Il était une fois dans l'Ouest. On jurerait que les musiques sortent d’un western spaghetti, et le personnage principal est énigmatique et peu disert. Certes elle parle un peu plus - on est quand même chez Tarantino - mais on ne connaît finalement d’elle que son statut de tueuse vengeresse.
            A l’inverse on a le droit à une biographie détaillée du personnage d’O-ren Ishii, formidable Lucy Liu, où Tarantino s’est fait plaisir avec les maîtres de l’animation japonaise Production I.G. (Ghost in the Shell, Jin-Roh). En effet Tarantino brode des pièces complètement dépareillées sur la forme autant que sur le fond. Et ça marche. Il faut voir avec quel brio est effectuée la transition du film au manga à ce moment, c’est une véritable leçon de réalisation. Jamais la série B n’avait été si luxueuse.

            Mais ce film ressemble aussi à un achèvement pour Tarantino. En effet tout est si poussé à bout ici que ses précédents films semblent aujourd’hui être des étapes vers l’aboutissement que constitue Kill Bill. Le réalisateur se cite d'ailleurs abondamment lui-même (plan de l’intérieur du coffre, présence d’Uma Thurman et de Michael Madsen). Continuer dans la même formule va devenir difficile sans l’auto-parodie. Alors tous les personnages qui ont construit ou alimenté l’univers tarantinien que l’on connaissait, Kill Bill les invite puis les massacre sans pitié. Manière de dire que c’est tout, Quentin passera ensuite à autre chose, comme Jackie Brown pouvait aussi le laisser présager ?

G.

Note : Cette critique fut rédigée à la sortie du film. Depuis j'ai revu plusieurs fois le film ainsi que sa suite et l'ensemble me semble être un véritable chef d'oeuvre. J'écrirai prochainement la critique du vol.2

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